Vers un Iran producteur de pétrole sans essence ?
Alors que l’administration Obama se démène pour concevoir une stratégie afin de s’occuper de l’intransigeance iranienne sur la question de l’enrichissement de l’uranium, celle-ci semble se diriger vers l’imposition d’un embargo international sur les ventes d’essence à l’Iran.
Cette interdiction serait appliquée au cas où les responsables iraniens n’arriveraient pas avec un plan de négociation acceptable, au plus tard lors de réunion de l’Assemblée Générale des Nations-Unies, qui se tiendra fin septembre – date limite fixée par la Maison Blanche pour une démarche constructive de la part de l’Iran.
Bien sûr, l’Iran est un producteur majeur de pétrole. Il a extrait quelques 4,3 millions de barils par jour en 2008. Mais l’Iran est également un très gros consommateur de produits pétroliers. Crependant, son industrie pétrolière a une faiblesse structurelle importante : sa capacité de raffinage est trop réduite pour satisfaire les besoins du pays en essence. Par conséquent, l’Iran est obligé d’importer environ 40% des produits raffinés dont il a besoin. Les responsables du gouvernement iranien essayent de réduire cette dépendance par le biais du rationnement et d’autres mesures, mais ce pays reste très vulnérable à toute réduction des importations d’essence.
A Washington, nombreux sont ceux qui voient cette vulnérabilité iranienne comme une occasion de contraindre ce pays à abandonner son programme d’armement nucléaire. Bien que les responsables iraniens nient rechercher des armes nucléaires, de nombreux analystes occidentaux pensent que l’effort d’enrichissement en cours actuellement à l’énorme installation de centrifugation de Natanz est destiné à produire de l’uranium hautement enrichi pour une bombe iranienne qui finira par exister.
Malgré la pression exercée par les Etats-Unis et l’Union Européenne, Téhéran a refusé de cesser son activité à Natanz ou de considérer la ralentir dans le cadre du processus de négociation. Les partisans d’un embargo sur l’essence soutiennent que les sanctions devraient être la prochaine étape au cas où l’Iran persisterait dans cette voie.
Si l’Iran ne se présente pas avec une position de négociation constructive lors de la prochaine réunion de l’Assemblée Générale des Nations-Unies, en septembre, la Maison Blanche devrait mettre au point un ensemble de tactiques comprenant d’autres options que la guerre. Attaquer l’installation de centrifugation de Natanz et d’autres installations nucléaires iraniennes pourrait retarder les ambitions nucléaires de ce pays, mais cela pourrait aussi décle,cher un conflit plus large qui nuirait sévèrement aux intérêts vitaux des Etats-Unis.
Pour être efficace, une interdiction sur l’essence nécessiterait l’approbation de la Russie, de la Chine, de l’Inde et d’autres puissances clés qui sont réticentes à l’idée d’imposer des sanctions sévères contre l’Iran. Ces pays commercent beaucoup avec l’Iran et ne mettront probablement pas en danger leur position bien établie là-bas, en se pliant à la mesure soutenue par les Etats-Unis.
La Chine et la Russie, qui disposent du droit de veto au Conseil de Sécurité de l’ONU, n’approuveront probablement pas toute mesure qui entraînerait une interdiction sur l’essence au moyen d’un blocus naval dans le Golfe Persique et l’Océan Indien – une action essentielle pour empêcher les contournements et la contrebande. Avec le soutien tacite de ses partenaires commerciaux, les Iraniens pourraient facilement contourner l’embargo par divers moyens.
Par Michael T. Klare (Foreign Policy In Focus)