Face à l'Ayatolland d'Iran, l'Europe peut-elle réagir ?
Émeutes à Téhéran… symptôme de la ligne dure en Iran
Téhéran est le théâtre de véritables émeutes entre la police et les forces de sécurité d’une part et des partisans de Moussavi et opposants à la réélection de Ahmadinejad d’autre part. Cette radicalisation du régime face à une société civile elle-même radicalisée montre bien à quel point, c’est la ligne autoritaire qui prédomine ce régime. La démocratie existe dans son aspect extérieur, mais la théocratie verrouille les contre-pouvoirs possibles.
Le (re-)président Ahmadinedjad a confirmé sa main mise sur le pouvoir par le biais du soutien des autorités religieuses. Sa ligne politique est fondée sur le clientélisme auprès des classes les plus populaires, dans les campagnes. D’un point de vue régional (et donc international), il joue sur une ligne dure où le rapport de forces avec Israel est la clé principale.
On ne peut que s’inquiéter de voir cette ligne politique se faire légitimer par les citoyens iraniens. Le président Ahmadinedjad sera tenté de mener son rapport de forces avec les autorités de Jérusalem au bout. De plus, le soutien qu’il a reçu de Chavez indique la montée de logiques d’alliances et de blocs que nous avons bien connus au XXe siècle. Or en cas de conflit, l’Europe ne pourra pas faire comme si cela ne la concernait pas.
Que fait l’Europe en cas de conflit avec l’Iran ?
Nous avons construit notre Europe sur la Norme. C’est le droit qui régit nos rapports entre Etats pour que nous ne nous fassions plus la guerre. Par voie de conséquence, notre poids dans le monde se fait par ce biais puisque nos pays sont trop “petits” pour pouvoir peser avec les arsenaux américains, russes ou chinois.
De plus, nous n’avons pas développer d’Europe de la défense. Le cas du Kosovo en 1999 était symptomatique : nous avons attendu que les Américains bougent pour les accompagner militairement sur notre propre continent. De plus, nous n’avons pas de diplomatie unifiée. Un citoyen européen en Iran devra se tourner vers son ambassade nationale, même si celle-ci est à l’autre bout de la ville. Celle d’un pays de l’Union européenne lui fermera ses portes.
Nous devons aujourd’hui nous interroger pour savoir pourquoi nous avons une Europe si faible diplomatiquement. Ce n’est pas une Europe des Etats comme la voudrait Nicolas Sarkozy qui nous le permettra. Car que se passera-t-il si l’Iran attaque un pays et que les Etats-Unis entrent en guerre ? Nous suivrons, au mieux. Souvenons-nous de la guerre en Irak en 2003 où les tergiversations des diplomaties avaient fait le jeu des Faucons de Washington. Il faudra que le Conseil européen se réunisse, que les diplomaties se mettent d’accord et que nous mettions en œuvre ensuite de manière coordonnée les décisions prises. L’Otan est plus rapide : nous suivons ce que veulent les Américains.
Je ne souhaite pas la guerre. Elle est source de drames et de pleurs. Je rêve d’un monde où les rapports entre Etats soient au moins aussi apaisés qu’ils le sont sur notre continent depuis la construction de notre Union. Mais comment donner envie aux autres pays de nous suivre si nous ne pesons pas dans les affaires internationales ?
Par Fabien Cazenave