Interview de Francis Szpiner, avocat de la famille d'Ilan Halimi

Publié le par JSS

http://www.nouveleconomiste.fr/Portraits/1361-Szpiner.jpgFrancis Szpiner, avocat de la famille Halimi, réagit aux déclarations de Me Eolas sur LEXPRESS.fr et aux mises en cause des avocats de la défense. Il revient également sur le futur procès en appel de dix-neuf membres du gang des barbares.

Les avocats de la défense dénoncent "l'ingérence du pouvoir politique dans l'autorité judiciaire" en raison de l'appel formulé par le parquet à la demande de la garde des Sceaux, notamment sous votre impulsion. Que répondez-vous?

Je considère que j'ai exercé mon devoir d'avocat. Dès la fin des réquisitions, la famille Halimi s'est sentie trahie par le ministère public estimant que les peines étaient trop indulgentes. J'ai donc demandé au garde des Sceaux d'user de son droit, à savoir celui de demander au parquet de faire appel. Michèle Alliot-Marie a considéré que cette demande était fondée. En tant qu'ancienne ministre de l'Intérieur, elle n'a pas besoin de subir de pression pour se rendre compte de ce qui se passe dans les banlieues. Car c'est bien le caractère exemplaire qui a fait défaut à ce procès, face à la banalisation de la violence dans les banlieues et à la montée de l'antisémitisme. Je respecte bien sûr la hiérarchisation des responsabilités et l'individualisation des peines mais il faut que celles-ci soient suffisantes pour que le procès soit exemplaire. La ministre de la Justice a pris ses responsabilités, contrairement aux braillards de la défense qui sont les seuls à politiser l'affaire.

Et si le procès en appel ne donne pas satisfaction à la famille Halimi?

La cour d'assise d'appel statuera en toute indépendance. Les jurés sont souverains et libres, la seule chose que nous souhaitons c'est que les jurés rendent leur verdict après un débat public et avec un ministère public qui soutienne l'accusation, ce qui n'a pas été le cas en première instance. Personne ne s'est interrogé sur la loyauté de l'avocat général, qui n'a pas hésité à s'épancher partout dans les médias. Quand le ton donné par le ministère public est très bas, il y a de fortes chances pour que les jurés le suivent et ne dépasse pas ses réquisitions. En l'occurrence, le réquisitoire de Philippe Bilger a été, dans cette affaire, non seulement faible dans le quantum des peines mais également dans l'explication de ces peines. L'avocat général a failli à sa mission, ce qui, je l'espère, ne sera pas le cas de son successeur. Eclairés différement et dans un autre contexte, les jurés peuvent changer d'avis. Si ce n'est pas le cas et que les peines sont identiques ou plus "légères", je m'inclinerai.

http://www.seraphicpress.com/images/Ilan_Halimi.jpgVous souhaitez que le débat soit public et avez dans ce sens attiré l'attention de deux parlementaires, François Baroin et Jack Lang, afin de changer la loi sur le huis-clos (la réforme permettrait aux cours d'assises de choisir entre un procès public et le huis clos si des accusés, mineurs au moment des faits sont en cause), ce que vous reprochent de nombreux acteurs de la justice...

Je suis consterné par ce que je lis dans la presse. Lorsqu'une loi est mal faite et pas adaptée, il faut la changer. Voilà tout ce que je m'efforce de faire. Je ne suis pas le premier et j'espère ne pas être le dernier à agir en ce sens. Le procès qui a eu lieu à huis-clos en première instance n'a pas eu les vertus pédagogiques souhaitables. Il faut que tout le monde sache ce qu'il se dit dans les débats et prenne la mesure de l'ignominie du crime qui a été commis. Cela gêne bien sûr les avocats de la défense que l'on puisse voir que leurs clients se sont acoquinés avec un Fofana. Quant à ceux qui craignent que le procès public donne à Fofana la tribune dont il rêve, je réponds que la justice est publique et que la République n'a pas à avoir peur de se confronter aux criminels. La vérité ne pollue jamais le débat. Fofana sera tout simplement dans la réalité de ce qu'il est. Je n'envisage pas l'hypothèse que ce procès en appel ne soit pas public. Je ferai tout pour que ce procès soit public.

Compte tenu de vos antécédents politiques (candidat pour l'UMP aux élections legislatives de 2002), ne redoutez-vous pas d'entretenir la polémique sur une connivence présumée entre justice et politique?

J'ai le sentiment que la loi est mauvaise et qu'il faut la changer. J'ai demandé l'aide de  François Baroin parce que je le connais bien, et celle de Jack Lang car c'est un homme de liberté, d'indépendance d'esprit et de gauche. Je me doutais que l'on me ferait cette critique, raison pour laquelle je suis allé voir l'ancien ministre de la Culture. Les deux députés partagent le même sentiment que moi au sujet du huis-clos et je m'en réjouis. Cette demande n'a rien de choquant: je l'ai faite en toute transparence, puis j'ai passé le flambeau à deux parlementaires qualifiés.

Publié dans France

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