Les peuples frères…
La semaine passée Mahmoud Abbas se rendait à Khartoum où il rencontrait el Présidente El Béchir, le dernier chef putschiste local en date, se trouvant encore à la tête du gouvernement du Soudan, malgré le commandement de la justice internationale réclamant qu’il soit déféré devant le tribunal pénal international (TPI) pour crime de génocide*1.
Reconduit dans ses fonctions par le congrès du Fatah, qui rappelait le droit inaliénable au retour (en Israël) des arabes *2 de la petite portion de la Palestine mandataire redevenue Israël, Mahmoud Abbas est venu à Khartoum donner l’accolade et apporter au chef djihadiste le soutien du « peuple frère palestinien au peuple frère soudanais et à son combat ».
Ce combat, j’ai eu plusieurs fois à rappeler ce qu’il est et ce qu’il fut. Mais il n’est pas inutile d’y revenir, au moment même ou une nouvelle campagne internationale est menée par de soi-disant « trotskistes », de prétendus « socialistes » et des « communistes » à la recherche d’un électorat qui s’évapore, et autres « anti-impérialistes »… Cette campagne honteuse qualifie Israël de bourreau, pour sa riposte de décembre janvier dernier en réponse à la guérilla du Hamas, menée depuis sa prise de pouvoir en 2006, au moyen de roquettes lancées plusieurs fois par jour, tous les jours, sur les kibboutz et les localités proches de Gaza.
Le soutien « du peuple palestinien au combat du peuple frère soudanais», représenté par El Béchir, est un soutien à la répression, un soutien à la dictature de la charia, un appui à la destruction du mouvement ouvrier, un satisfecit à l’éradication de populations entières, sans distinction d’âge et de sexe, une approbation pour l’expulsion sans autre forme de procès de centaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants dont les villages ont été pillés puis incendiés.
C’est un blanc seing aux actions du « peuple frère », qui a transformé en super Oradour sur Glane 400 km2 du Darfour ; 400km2 de villages entièrement carbonisés, à la suite des actions des milices Jenjawid combinées aux bombardements de l’aviation de Khartoum.
Comment prétendre revendiquer le « retour de tous les réfugiés Palestiniens » du nouveau né au dernier moribond, un droit que le congrès du Fatah et ses compagnons de routes affirment inaliénable ; un droit qui serait un droit arabe palestinien supérieur aux droits nationaux du peuple juif sur sa propre terre, sur Jérusalem en particulier, ville symbole depuis presque trois mille ans, ville où, sauf de brèves périodes d’expulsion, les Juifs ont vécu de tous temps, même avant 1948, et où ils étaient majoritaires en 1948, y compris à « Jérusalem-Est » au moment de leur expulsion ; comment ériger en droit définitif et non négociable cette exigence, quand on apporte son soutien fraternel et public à un gouvernement qui massacre et expulse par dizaines et par centaines de milliers les négro africains autochtones?
Est-ce pour faire concurrence à Hamas, ces honteuses courbettes devant le chef massacreur djihadiste de Khartoum ?
Je vous recommande de lire attentivement cette semaine les articles qui paraîtront, en France, en Grande Bretagne, en Suède et ailleurs, dans cette presse « révolutionnaire », « internationaliste », « anti-impérialiste », dans cette presse si sourcilleuse, si vindicative pour stigmatiser des pires mots le moindre acte réel ou supposé d’Israël.
Si cette presse se démarquait de cette amitié si singulière entre « peuples frères » et de la manifestation scandaleuse de leur « combat commun » exprimée par le chef de l’autorité palestinienne, il y aurait quelque chose de positif de changé dans ces milieux où, sous couvert d’antisioniste, fermente depuis ces dernières années un grouillant et putride mélange, du genre qui produisit l’anticapitalisme des SA et des SS….
Je serai bien sur le premier à m’en féliciter.
Par Alain RUBIN
*1 Dans le cas du chef actuel du djihad soudanais, il ne s’agit pas de centaines, ni même de milliers de personnes massacrées. Les populations négro africaines, victimes des Jenjawid et des forces armées régulières du gouvernement de Khartoum, se comptent par centaines de milles de tués, hommes, femmes, enfants et vieillards. Des populations villageoises entières, expulsées à des centaines de kilomètres de leurs terres tribales ancestrales. Elles sont estimées, pour les seuls Darfouri, à 2,5millions de personnes.
Le génocide soudanais au Darfour, impulsé du sommet du gouvernement putschiste de Khartoum, s’ajoute à l’extermination des petits clans animistes réfugiés dans les monts noubas pour échapper au razzias négrières qui ne cessèrent jamais à partir du nord arabisé du Soudan. S’y ajoute encore la guerre contre les négro africains chrétiens du sud Soudan, qui fit plus de deux millions de victimes et de très nombreuses personnes déplacées. S’y ajoute encore, les nombreuses fusillades, dont le nombre de victimes ne nous est pas connu, et les emprisonnements des militants des organisations politiques et syndicales du mouvement ouvrier, très actives au Soudan jusqu’au coup d’état du général Nimeyri de 1974 ; coup destiné à imposer la charia à la société soudanaise toute entière.
*2 Estimé selon les sources entre 450 milles et 700 milles en 1948, les arabes de l’Israël restauré, qui fuiront (ou seront expulsées) les zones des combats déchaînés par la guerre totale déclenchée par la ligue arabe (guerre pour en finir avec les « yahoud » et en rejeter à la mer les survivants) représentent, en 2009, cinq à six millions de personnes affirmant en descendre. Ainsi le franco palestinien Hamouri, né à Jérusalem en 1985 et venu vivre en France avec sa famille. Militant stalino nationaliste du FPLP, il a été condamné et emprisonné en Israël, à l’issue d’un procès public pour la conception et la préparation de l’assassinat du grand rabbin sépharade Ovadia Yossef ; il est un exemple de ces réfugiés que ses amis du PCF aurait, dans les années 50-60, qualifié de « revanchard fauteur de guerre » s’il avait été un de ces 12 millions d’allemands expulsés manu militari en 1945 des pays passés sous la coupe du stalinisme où des minorités da langue allemande avaient toujours vécu ou vécu pendant des siècles (Pologne, région de la Volga, Hongrie, Tchécoslovaquie, Roumanie); ce militant, que plusieurs municipalités PCF et leurs comparses font, ici et là, nommer citoyen français d’honneur, ce militant est typique de ces hommes et femmes dont le congrès du FATAH réaffirme l’exigence du droit au retour ; pour eux et le congrès du FATAH, c’est un retour conçu comme un droit d’office à une citoyenneté basée sur le dénie de l’œuvre de reconstruction de fond en comble d’un pays qui avait été transformé, pour l’essentiel, en dehors de quelques oliveraies, en marigots bourdonnant de moustiques, en sables et pierres stériles.
C’est d’ailleurs au nom de ce droit, et dans la perspective que l’Israël reconnu par les pays arabe ne serait plus la restauration politique et la souveraineté de la nation juive mais un état arabo musulman de plus (et le troisième état palestinien avec l’ancienne Judée Samarie devenue Palestine vidée de ses Juifs et la Jordanie, où les Palestiniens sont majoritaires et disposent de la citoyenneté et où les Juifs sont légalement interdits), avec une minorité juive conçue comme une « religion », mais pas comme une minorité nationale, que toutes sortes de billevesées paraissent ces derniers temps déniant au peuple juif jusqu’à son existence plusieurs fois millénaires comme nation puis comme peuple dispersé.