Le Royaume-Uni s’engage à parlementer avec le Hezbollah
Washington a fermement critiqué la décision britannique de discuter avec la branche politique du Hezbollah et s’est plaint du fait que la nouvelle Administration Obama n’ait pas préalablement été avertie de cette initiative.
Traduction de : Marc Brzustowski. (: Remarque préalable du traducteur : ce texte est une illustration des errements diplomatiques occidentaux et de leur caractère brouillon qui semblent résulter d’effets d’annonce, en l’absence de concertation entre partenaires de la même alliance. Cette désorganisation est, elle-même, la possible conséquence d’une absence de stratégie globale en matière de diplomatie internationale, à l’heure où la nouvelle Administration de Barack Obama sonde le terrain, sans vision claire sur ses propres objectifs, a fortiori pour ses alliés qui s’inquiètent du devenir de leurs intérêts, politiques, financiers ou pétroliers dans la Région. Les Alliés interprètent librement, mais sans considération pour ses conséquences (pour soi et pour les autres), un discours d’ouverture prononcé durant une campagne présidentielle américaine et réadapté au fur et à mesure de la prise de fonction par le nouveau Président Obama. Celui-ci compte bien garder la maîtrise d’œuvre de ses offres, sans précisément savoir quand ni comment, jusqu’où, ni même quel est le bon interlocuteur, parmi trois choix possibles : l’Iran, la Syrie, le Hezbollah. Personne ne souhaite se faire damer le pion et chacun avance les siens dans le plus parfait désordre de bataille. On se souvient des anticipations réalisées, tant en ce qui concerne le Liban que la Syrie par le Gouvernement Sarkozy. Gordon Brown lance sa propre initiative en direction du Hezbollah, sans en avertir l’Administration américaine qui s’en offusque.
La surenchère diplomatique s’engage donc tous azimuts. Mais si jamais ces démarches devaient ensuite s’avérer peu consistantes ou infondées, mal payées en retour, comme c’est bien probable, on voit mal comment les alliés pourraient se regrouper pour arrêter une ligne de conduite commune. On assiste là à des effets en cascade, où l’Iran, joueur d’échecs avisé, tire partie du manque de coordination élémentaire des puissances occidentales, du fait de leurs intérêts particuliers…
On peut, bien entendu, faire l’hypothèse inverse, arguant que cette mise en scène est parfaitement rôdée et que chaque partenaire y tient un rôle répété à l’avance, visant à faire des offres séparées à différents protagonistes de façon à semer la confusion dans l’esprits des membres de l’alliance adverse, tout en diffusant un écran de fumée qui donnerait l’impression d’une mésentente occidentale généralisée. Ce qui prévaut, néanmoins, c’est que cette « stratégie du turban » est marquée du sceau de l’absence de fermeté et de gouvernance, où tout devient « négociable ». Y compris, bien entendu et depuis longtemps, la mémoire des soldats français ou américains, des diplomates, des victimes juives argentines de l’AMIA à Buenos-Aires, tombés sous les coups du Hezbollah terroriste. L’Angleterre détient un lourd palmarès de superposition confuse entre sa propre situation à l’égard de l’Irlande du nord, une province rebelle du Royaume, et la situation au Moyen-Orient. Elle réédite ici des démarches plus discrètes menées en direction du Hamas ou d’autres de même acabit (Talibans, milices chi’ites d’Irak à Bassorah, etc.). Perfide Albion ? Ou nouveau « Munich 38 » ? Il manquerait donc un Winston Churchill à ce mauvais remake d’un sinistre drame au goût amer de « déjà-vu »… A moins qu’Israël ne soit le « père fouettard » de ces joyeuses retrouvailles, devant, sous pressions démultipliées, déterminer pour sa sauvegarde quand la partie de poker-menteur risque d‘atteindre le point de non-retour. Autant dire que le pied-de-nez de l'ancienne puissance coloniale a dû être diversement apprécié à Jérusalem...
Par Alex Spillius à Washington.
Dernière mise à jour: 12:14AM GMT 13 Mar 2009
L’objection (NdT : émise par les Etats-Unis) souligne la difficile reprise de la “relation exceptionnelle” entre les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, après la visite de Gordon Brown à M. Obama la semaine dernière.
Le voyage a été assombri par les craintes que l’alliance traditionnelle ne décline sous la direction nouvellement élue à la Maison Blanche et que cela se traduise par une moindre consistance des offres peu motivées de M. Obama à l’adresse du Premier Ministre.
Mais le premier désaccord politique sérieux a surgi au sujet du Hezbollah, le mouvement libanais que Washington a mis sur sa liste rouge en tant qu’organisation terroriste, dès l’annonce faite par le Bureau des affaires étrangères (« Foreign Office » britannique), la semaine dernière, qu’il s’entretiendrait avec la branche politique de la milice.
Un responsable de haut niveau du gouvernement américain a fait savoir qu’il aimerait demander aux Anglais « d’expliquer la différence entre les branches politique, militaire et sociale du Hezbollah », ajoutant : « nous ne percevons pas les mêmes différences qu’eux au sein du cercle dirigeant intégré».
Il a fait remarquer que les bastions du Hezbollah dans le sud de Beyrouth ont récemment marqué le premier anniversaire de la mort d’Imad Moughniyeh par des célébrations de masse. Moughniyeh était une figure prédominante de l’organisation, impliqué dans les attentats à la bombe contre des baraquements militaires et l’Ambassade américaine à Beyrouth, qui ont tué plus de 350 personnes, autant que dans le kidnapping de dizaines d’étrangers au Liban dans les années 1980.
Le responsable explique que : “Durant des années, le Hezbollah a nié avoir connaissance d’Imad Moughniyeh », « et maintenant, se dressent partout dans le Sud de Beyrouth ces portraits à la gloire des vertus d’Imad Moughniyeh. »
Lorsqu’on lui demande si Washington a été informé par avance de la décision du Foreign Office, il rétorque : “ informé par une précédente administration” serait une description plus exacte”.
Au moment de cette annonce, le Foreign Office a publié une déclaration disant que la Grande-Bretagne avait « reconsidéré notre (sa) position concernant l’absence de contact avec le Hezbollah à la lumière de récents développements plus positifs au Liban », faisant référence à la formation d’un gouvernement d’union nationale comprenant le Hezbollah.
Washington a toujours soutenu que le Hezbollah est financé par l’Iran et a lourd casier relevant les traces de son implication dans les activités terroristes. Quoiqu’il dispose d’un bureau politique et d’un réseau d’institutions de bienfaisance, les Américains s’en tiennent à leur vision qu’il s’agit bien là d’une seule et même organisation cohérente.
Le Département d’Etat a déclaré publiquement qu’il était « alarmant » que les Britanniques « considèrent l’adoption d’une telle position ».
Gordon Duguid, porte-parole du Département d’Etat a déclaré, la semaine dernière : “Nous ne sommes pas prêts à leur emboîter le pas. Notre point de vue sur le Hezbollah n’a pas changé »
Ironie de l’histoire, le Foreign Office pourrait bien y avoir été encouragé par l’ouverture inédite de l’Administration Obama, d’autant qu’elle a vu, auparavant, la Secrétaire d’Etat Hillary Clinton expédier deux émissaires en Syrie pour des négociations de longue haleine.
Le responsable américain a expliqué que ces discussions se sont avérées « complètes et constructives », puisque les deux partis ont pu s’entretenir de leurs préoccupations mutuelles et chercher un terrain d’entente.