La réponse "d'Arthur le financier des soldats sionistes"

Publié le par JSS

Après Vals-les-Bains et Lille, alors que je suis dans ma loge, on m’annonce que, pour la troisième fois cette semaine, des manifestants propalestiniens sont devant le théâtre où je dois me produire. Encore. Muni d’une banderole, un groupe scande "Arthur sioniste, Arthur complice !" Un autre : "Arthur Essebag finance la colonisation !"
D’autres encore, brandissent à bout de bras des photos d’enfants palestiniens ensanglantés avec écrit "Arthur soutient la guerre !" Et puis, se voulant sans doute blessant, mais juste ridicule, pathétique : "Arthur larbin !"
Par la fenêtre, au milieu d’un imposant service de sécurité, je les regarde. Ils sont moins nombreux qu’à Lille et Vals-les-Bains. Mais calmes. Organisés. Déterminés. Le plus effrayant, c’est qu’ils semblent sincèrement convaincus de ce qu’ils disent...
Après l’étonnement, l’incompréhension. Puis, le silence. Puis, ce dilemme que, pour la première fois de ma vie, je découvre : répliquer au risque de donner trop d’importance à une minorité de sots qui ne rêvent que de jeter le feu dans les esprits - où me taire en espérant, ainsi, apaiser cette violence folle ? Il m’aura fallu attendre la troisième manifestation pour prendre mon parti. Je ne le fais pas pour moi. Je le fais pour les hommes et les femmes qui sont venus à ces spectacles malgré la menace, je le fais pour tous les amis, connus et inconnus, qui entendent ces inepties, m’écrivent et ne comprennent pas. Je le fais pour tous les simples citoyens qui n’ont pas le même accès que moi aux médias et qui ont à supporter, souvent avec plus de violence que moi, le même type d’injures, de stigmatisation, bref, d’antisémitisme.
D’où vient cette haine ? Et qu’est-ce que je viens donc faire dans le conflit israélo-palestinien ? Tout commence en janvier 2004, quand Dieudonné déclare au détour d’une interview au magazine The Source, qu’il existerait : "Un lobby juif très puissant qui aurait la mainmise sur les médias, dont fait partie Arthur qui, avec sa société de production, finance de manière très active l’armée israélienne. Cette armée qui n’hésite pas à tuer des enfants palestiniens." Qu’est-ce qui fait que ces propos aient été relayés sans commentaire dans les colonnes du Monde ? (NDLR : <Le Monde du jeudi 8 janvier 2004 citait les propos de Dieudonné au magazine The Source).
Qu’est-ce qui fait que cette pure imbécillité, cette rumeur sans l’ombre d’un fondement, est aussitôt relayée par une grande partie de la presse ? D’où vient que soit pris pour argent comptant le délire d’un humoriste qui eut, jadis, un peu de talent mais qui commence, à ce moment-là, la pathétique dérive qui, à coups d’insultes répétées contre des artistes juifs ou supposés tels, va le mener tout doucement au contact du Front national ? Je l’ignore. D’autres que moi recomposeront l’histoire de cette incroyable indulgence dont les provocations, les mensonges, les constructions énormes de ce personnage auront bénéficié dans les médias.
Pour moi, le mal était fait. Si c’était dans le journal c’est que c’était vrai. Suite à cet article, Dieudonné sera condamné pour diffamation raciale par le tribunal correctionnel de Paris et par la cour d’appel de Paris. Mais, encore une fois, le mal était fait. Et je me trouvais confronté à cette loi d’airain qui veut que, dans ces "batailles", là aussi, la première frappe est souvent, hélas, la plus dévastatrice.
Tous les témoins de ces manifestations racontent. De l’imbécile "Arthur est sioniste, il finance Israël avec son fric !", on est vite passé à l’infect "de toute façon il est juif donc il soutient les bombardements de Gaza !" Juif... sioniste... finance... fric... Tout est dit. Et, sitôt la dépêche AFP publiée, les sites et blogs Internet se déchaînent. C’est comme s’ils étaient dans les starting-blocks et n’attendaient que cela. C’est comme si ceux qui n’avaient jamais pu exprimer leur fiel, leur antisémitisme à mon encontre, pouvaient enfin se lâcher au grand jour. Certains sites, débordés, horrifiés, fermeront leurs commentaires et forums ; d’autres comme celui du Point où du Nouvel Observateur laisseront faire.
Quant à moi, pour la première fois de ma vie, à 42 ans, je découvre cette forme de haine. Fini le cocon douillet de l’animateur vedette. Je prends de plein fouet ce drôle de retour du refoulé. Les vieux démons se réveillent et c’est moi, cette fois, qu’ils pointent du doigt. En surfant sur le Net dans l’encyclopédie Wikipédia, je découvre, dès la première ligne, au milieu de mille inepties, que je suis "d’origine juive, marocaine" et plus loin "déjà multimillionnaire". Laurent Gerra, Jamel Debbouze, les autres artistes, ont-ils droit à ce type de précisions et, dans mon cas, d’imprécisions peu innocentes ? Non. Arthur, juif, argent, marocain, donc pas français. Encore...
C’est aussi sur Internet que Le Figaro a lancé l’odieuse rumeur "Arthur aurait vendu son appartement à Vladimir Poutine !" Non seulement odieuse, la rumeur. Non seulement lancée sur la Toile et aux chiens, sans que nul ait pris la peine d’aller à la source, se renseigner, vérifier. Mais fausse, évidemment. Dénuée - je rougis d’avoir à la préciser - de l’ombre d’un fondement. Mais voilà... Tout le monde connaît Poutine...
Et quelle aubaine de pouvoir ajouter à mon portrait cette délicate nuance : "Arthur... argent... que ne ferait-il pour de l’argent, Arthur ? Ces gens-là, les gens de son espèce, n’ont-ils donc aucun principe, aucune valeur et, quand il s’agit d’argent, aucune retenue ?", "Arthur sioniste ! Arthur finance l’armée d’Israël !" : Cette horrible phrase, ce mensonge repris en boucle par des centaines de sites et d’articles de presse, comme j’aurais aimé qu’un journaliste, un seul, prenne soin de le vérifier.
J’aurais aimé que le maire de Lille réagisse. J’aurais aimé que le maire de Belfort réagisse. J’aurais aimé que tout ceci ne soit qu’un cauchemar. Mais ce n’est pas un cauchemar et le réveil est douloureux.
Même si je suis sonné, je reste debout. Même si c’est compliqué, je mets un point d’honneur à ce que ma tournée se poursuive. Venant de ma part, certains trouveront tout cela anecdotique. D’autres non.
Je m’appelle Jacques Essebag. Je suis né le 10 mars 1966 à Casablanca. Durant la guerre des Six-Jours, ma famille a quitté le Maroc pour s’installer dans la patrie des droits de l’homme. Je suis français.
Jamais je n’aurais imaginé, que dans mon propre pays, dans ce pays que j’aime tant, dans ce pays qui m’a tant donné et auquel j’essaie de rendre un peu, on puisse manifester contre moi uniquement parce que je suis juif
-Article rédigé par Arthur et publié dans Le Monde, édition du 7 février 09-

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Y
et peu a peu on oublie le principalMais qu'est ce que ces musulmans d' Afrique du nord sont venus foutre içi??d'accord ils y ont bossé a l ' époque des 30 glorieuses, mais nous aussi!!Nous  sommes venus en France parce que ces memes musulmans ou leurs parents nous ont chassés de leurs trois républiques islamiquesOKmais ces escrocs a la pitié se sont empressés de nous suivre et de s' incruster dans une République qu'ils haissent et revent de transformer en état islamique..la question est lancinante!!foutez nous la paix et dégagez dans vos bleds d' originevotre francisation n 'est qu'une francisation de confort économiquevous les Indignes de la République...le drame fut de croire il y a quarante ans de croire qu'ils feraient de bon Français comme les Polonais,les Espagnols, les Juifs Slaves,les Italiens,les Portugais...Loupé!!
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N
Ne me faites pas croire que vous n'avez pas compris la différence entre le judaïsme et le sionisme M. Essebad.<br /> Comme le dis M. Ouziel, le faux est condamné à disparaître.
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F
Jacques Essebag,dit Arthur,vient de prendre la leçon que tous les membres de la communauté juive de France (mais aussi d'ailleurs)devraient méditer:comme la plupart d'entre nous,français nous sommes devenus,par grands parents ou parents immigrés,d'Europe centrale ou d'Afrique du nord,et fiers d'être parfaitement "intégrés" à la Nation,respectueux des lois de ce pays d'accueil. Et comme l'affirme Arthur "Je suis français"..."je n'aurais jamais imaginé que dans mon pays on puisse manifester contre moi uniquement parce que je suis juif " Quelle naïveté! Cher Arthur vous auriez du regarder d'un peu plus près les leçons de l'Histoire car nos grands parents qui avaient fait la guerre de 14 et parents qui allaient se battre pour la France en 39,et qui étaient autant français que vous l'êtes aujourd'hui,ont bien été marqués du sceau de l'étoile jaune puis pour beaucoup rafflés par leur propre police qu'ils "nourrissaient" de leurs impôts!Français ils étaient,convaicus que sous cette bannière ils étaient à l'abri de tout antisémitisme et de tout rejet par cette société laïque qui avait imaginé et écrit "La Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen".Voilà 5000 ans que les Juifs se battent pour être reconnus comme de simples citoyens égaux aux autres,voici autant de temps qu'on leur rappelle cycliquement qu'ils portent l'étoile jaune,devenue bleu comme le ciel et l'éternité en Israël.Il y a même des évêques qui nient la Shoa sans qu'au moins les juifs ne défilent dans la rue...Alors cher Arthur,ne soyez pas étonné que dans "votre pays"on vous remette à votre place, français " mais" juif!vous êtiez marqué du sceau du bouc émissaire mais vous ne vouliez pas le croire ou le savoir. Vous avez attendu pour vous rebeller et vous indigner. Prenez conscience que voilà des années que certains d'entre nous se battent pour que les agressions antisémites cessent dans ce beau pays que nous aimons tant.Pour cette noble cause nous ne vous avons,sauf oubli de ma part, jamais ni vu ni entendu. J'espère que cet avertissement sans frais que vous avez subi, et qui vous a sensibilisé car il s'agissait de votre personne, ne restera pas sans suite et que dorénavant vous oserez dénoncer publiquement toute malveillance envers vos semblables comme si vous étiez vous-même atteint.<br /> " Quelle rage a-t-on d'apprendre ce qu'on craint toujours de savoir" Beaumarchais
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W
Ca s'appelle les conflits importés quand les diasporas sont puissantes. Pour une fois, je suis d'accord avec Essebag.
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