Il y a 37 ans, la tuerie des Jeux de Munich
Des terroristes arabes, membres du groupe « Septembre noir », font irruption dans le village olympique de Munich avec l'intention de prendre en otage des athlètes de la délégation israélienne. Cette intervention, et son dénouement tragique, sont à l'origine de la pire crise de l'histoire des Jeux.
Deux membres de la délégation israélienne sont abattus au village et neuf autres séquestrés par les terroristes entrés en action le matin du 5 septembre. En retour des otages, ceux-ci exigent que l'on relâche des prisonniers arabes détenus en Israël. Après plusieurs heures de négociation, les terroristes se dirigent avec leurs otages vers l'aéroport de Fürstenfelbruck. Un jet, qui doit prendre la direction du Caire, les y attend. Mais une intervention policière tourne à la catastrophe, entraînant dans la mort tous les otages ainsi que cinq des huit terroristes. Les Jeux olympiques sont suspendus pour 24 heures. Une cérémonie à la mémoire des victimes se déroule dans le stade le 6 septembre. Selon le voeu du président du Comité international olympique (CIO), l'Américain Avery Brundage, les compétitions reprennent le lendemain. La décision fera couler beaucoup d'encre, même après les cérémonies de fermeture du 11 septembre. Lors des Jeux suivants, à Montréal, en 1976, des mesures de sécurité exceptionnelles seront adoptées afin d'éviter la répétition d'un attentat de ce genre.
Rédigé par l'excellent site: Perspectives Monde
Article de Jean Daniel dans le Nouvel-Obs du 11 septembre 1972:
«...à Munich, le monde a découvert que la violence s'engouffrait désormais dans la moindre brèche laissée ouverte. (...) Il a eu le sentiment d'une rupture. Il a eu le vertige. Il a appelé cela : barbarie. Mais il y a eu autre chose. Il y a eu une manifestation allemande, chrétienne et occidentale. Les morts auxquels on a rendu hommage au cours de cette stupéfiante cérémonie, ce ne sont pas les entraîneurs et les athlètes israéliens abattus. Ce sont les juifs - qu'ils constituent un peuple, une collectivité religieuse ou une collection d'individus- qui ont subi, il y a vingt-huit ans, un génocide, lequel demeure, aujourd'hui encore, insupportable à cette conscience que l'on dit universelle. L'Occident chrétien et blanc a encore mal à ses juifs. Il a raison. La cérémonie de Munich était une messe expiatoire. Que pouvait-elle être d'autre en Allemagne - et dans ce lieu si proche des camps de concentration ? Sans le vouloir, les terroristes palestiniens de Septembre noir, au lieu de rappeler qu'il existait une nouvelle diaspora, faite d'Arabes errants et de personnes déplacées, trahies de toute part à commencer par les leurs, au lieu de concentrer les regards du monde sur la valeur de leur cause en brisant le symbole olympique, ces terroristes n'ont fait qu'aviver la conscience coupable dans les lieux privilégiés de la culpabilité.»
Paul Guimard, «La fin de l'innocence»
«...Je ne crois pas que les morts d'Israël entraînent les Olympiades dans leur tombe. La beauté des exploits de ceux qui en sont les héros est irrésistible, et la télévision leur donne une dimension immense. Mais les jeux Olympiques devront se démaquiller d'une littérature révolue. Ils devront se constater pour ce qu'ils sont : une lutte féroce d'intérêts matériels et de prestiges nationaux, la continuation de la politique par d'autres moyens. Seuls, ses acteurs resteront jeunes. Comme nous, leurs spectateurs, les jeux Olympiques ont vieilli. Comme nous, ils survivront, mais ils ne seront plus jamais innocents.»
L'Express (France), 11 au 17 septembre 1972
Claude Ryan, «Après le massacre de Munich»
«...Au lendemain du drame de Munich, gouvernements et hommes d'État renouvellent leur engagement de combattre le terrorisme et invitent les peuples à une collaboration plus efficace à cette fin. L'expérience des dernières années enseigne qu'il sera non moins efficace, à long terme, de s'attaquer aux causes qui alimentent le désespoir et le terrorisme à travers le monde. Les causes sont bien connues : elles ont nom injustice, spoliation, persécution, dépossession. Les sentiments d'horreur inspirés par les méfaits du terrorisme font oublier pendant un certain temps ces causes. Ils ne sauraient toutefois les effacer. La vraie civilisation exige que ceux qui pleurent aujourd'hui les morts de Munich rouvrent aussi le douloureux dossier palestinien. À défaut de quoi les larmes versées sur Munich seront stériles.»
Le Devoir (Québec, Canada), 7 septembre 1972
Éditorial
«...Are medals and commercial contracts more important than human lives ? The question rises inevitably in the wake of the incomprehensible decision to continue the 1972 Olympic Games. The bodies of the eleven Israeli athletes and coaches killed by Arab terrorists were still unburied when the games resumed yesterday (...) For millions all over the world, the indecent haste on the part of the International Olympic Committee to go back to fun and games is unacceptable. The United States could demonstrate its own sense of values by unilaterally withdrawing its team from further competition at Munich. Perhaps the whole concept of the Olympics needs re-examination. No one can doubt now that the idea of an «Olympic peace» is a mockery. Far from increasing friendship among nations, the games all too often reflect and deepen nationalistic and other animosities. Furthermore, the commercialism that surrounds the games is but thinly veiled.»
New York Times (États-Unis), 7 septembre 1972.
Deux membres de la délégation israélienne sont abattus au village et neuf autres séquestrés par les terroristes entrés en action le matin du 5 septembre. En retour des otages, ceux-ci exigent que l'on relâche des prisonniers arabes détenus en Israël. Après plusieurs heures de négociation, les terroristes se dirigent avec leurs otages vers l'aéroport de Fürstenfelbruck. Un jet, qui doit prendre la direction du Caire, les y attend. Mais une intervention policière tourne à la catastrophe, entraînant dans la mort tous les otages ainsi que cinq des huit terroristes. Les Jeux olympiques sont suspendus pour 24 heures. Une cérémonie à la mémoire des victimes se déroule dans le stade le 6 septembre. Selon le voeu du président du Comité international olympique (CIO), l'Américain Avery Brundage, les compétitions reprennent le lendemain. La décision fera couler beaucoup d'encre, même après les cérémonies de fermeture du 11 septembre. Lors des Jeux suivants, à Montréal, en 1976, des mesures de sécurité exceptionnelles seront adoptées afin d'éviter la répétition d'un attentat de ce genre.
Rédigé par l'excellent site: Perspectives Monde
Article de Jean Daniel dans le Nouvel-Obs du 11 septembre 1972:
«...à Munich, le monde a découvert que la violence s'engouffrait désormais dans la moindre brèche laissée ouverte. (...) Il a eu le sentiment d'une rupture. Il a eu le vertige. Il a appelé cela : barbarie. Mais il y a eu autre chose. Il y a eu une manifestation allemande, chrétienne et occidentale. Les morts auxquels on a rendu hommage au cours de cette stupéfiante cérémonie, ce ne sont pas les entraîneurs et les athlètes israéliens abattus. Ce sont les juifs - qu'ils constituent un peuple, une collectivité religieuse ou une collection d'individus- qui ont subi, il y a vingt-huit ans, un génocide, lequel demeure, aujourd'hui encore, insupportable à cette conscience que l'on dit universelle. L'Occident chrétien et blanc a encore mal à ses juifs. Il a raison. La cérémonie de Munich était une messe expiatoire. Que pouvait-elle être d'autre en Allemagne - et dans ce lieu si proche des camps de concentration ? Sans le vouloir, les terroristes palestiniens de Septembre noir, au lieu de rappeler qu'il existait une nouvelle diaspora, faite d'Arabes errants et de personnes déplacées, trahies de toute part à commencer par les leurs, au lieu de concentrer les regards du monde sur la valeur de leur cause en brisant le symbole olympique, ces terroristes n'ont fait qu'aviver la conscience coupable dans les lieux privilégiés de la culpabilité.»
Paul Guimard, «La fin de l'innocence»
«...Je ne crois pas que les morts d'Israël entraînent les Olympiades dans leur tombe. La beauté des exploits de ceux qui en sont les héros est irrésistible, et la télévision leur donne une dimension immense. Mais les jeux Olympiques devront se démaquiller d'une littérature révolue. Ils devront se constater pour ce qu'ils sont : une lutte féroce d'intérêts matériels et de prestiges nationaux, la continuation de la politique par d'autres moyens. Seuls, ses acteurs resteront jeunes. Comme nous, leurs spectateurs, les jeux Olympiques ont vieilli. Comme nous, ils survivront, mais ils ne seront plus jamais innocents.»
L'Express (France), 11 au 17 septembre 1972
Claude Ryan, «Après le massacre de Munich»
«...Au lendemain du drame de Munich, gouvernements et hommes d'État renouvellent leur engagement de combattre le terrorisme et invitent les peuples à une collaboration plus efficace à cette fin. L'expérience des dernières années enseigne qu'il sera non moins efficace, à long terme, de s'attaquer aux causes qui alimentent le désespoir et le terrorisme à travers le monde. Les causes sont bien connues : elles ont nom injustice, spoliation, persécution, dépossession. Les sentiments d'horreur inspirés par les méfaits du terrorisme font oublier pendant un certain temps ces causes. Ils ne sauraient toutefois les effacer. La vraie civilisation exige que ceux qui pleurent aujourd'hui les morts de Munich rouvrent aussi le douloureux dossier palestinien. À défaut de quoi les larmes versées sur Munich seront stériles.»
Le Devoir (Québec, Canada), 7 septembre 1972
Éditorial
«...Are medals and commercial contracts more important than human lives ? The question rises inevitably in the wake of the incomprehensible decision to continue the 1972 Olympic Games. The bodies of the eleven Israeli athletes and coaches killed by Arab terrorists were still unburied when the games resumed yesterday (...) For millions all over the world, the indecent haste on the part of the International Olympic Committee to go back to fun and games is unacceptable. The United States could demonstrate its own sense of values by unilaterally withdrawing its team from further competition at Munich. Perhaps the whole concept of the Olympics needs re-examination. No one can doubt now that the idea of an «Olympic peace» is a mockery. Far from increasing friendship among nations, the games all too often reflect and deepen nationalistic and other animosities. Furthermore, the commercialism that surrounds the games is but thinly veiled.»
New York Times (États-Unis), 7 septembre 1972.