Qu'entend t-on par "menace militaire iranienne" ?

Publié le par JSS

L’Iran représente une puissance militaire qu’il convient de ne pas sous‐estimer. Toutefois, ses matériels classiques sont dans leur grande majorité vétustes et nombre d’entre eux ne sont plus opérationnels faute de pièces de rechange. Les membres des forces armées, en particulier les pilotes, manquent cruellement d’entraînement. Seuls les Pasdarans sont psychologiquement prêts à se battre avec fanatisme, et pour certains avec l’expérience qui leur est reconnue, particulièrement dans le domaine de la guerre secrète. Face à une menace d’intervention américaine, les forces armées iraniennes se préparent donc à un conflit
asymétrique.

Le Conseil Suprême de la Défense (CSD)
Selon l’article 110 de la Constitution de la République islamique d’Iran de 1979, le CSD ou « Faqih » est directement placé sous l’autorité du guide suprême de la révolution, l’ayatollah Khamenei. Il a la possibilité de proposer toute déclaration de guerre, de mobiliser les forces armées, de désigner les chefs des différentes armées et des Pasdarans. Les plans stratégiques et la politique de défense sont de son ressort. Il a également un rôle de contrôle de la défense à tous les niveaux et peut imposer à tout moment un droit de veto. Le guide suprême de la révolution délègue la direction du CSD au président de la république mais se réserve le rôle de décideur final. Les autres membres siégeant au CSD sont le Premier ministre, le ministre de la Défense, le chef d’état-major général et le commandant en chef des Pasdarans. Lors des réunions, selon les sujets inscrits à l’ordre du jour, d’autres responsables peuvent être invités : le ministre de l’Intérieur, le ministre des Affaires étrangères, le ministre des Gardiens de la révolution, etc. Le CSD est surveillé par deux proches conseillers du guide suprême de la révolution.

Le Conseil Suprême de la Sécurité Nationale (CSSN)
Selon l’article 177 de la Constitution, le CSSN a en charge :
− de déterminer la politique de sécurité et de défense du pays ;
− de coordonner les activités politiques, sociales, culturelles, économiques et le renseignement en vue de respecter la politique de sécurité et de défense du pays ;
− de gérer les ressources du pays afin de faire face aux menaces intérieures et extérieures.
A cette fin, des sous-comités spécialisés ont été créés. Le chef du CSSN est Ali Larinaji ; son adjoint est Rahmani-Fazli. Le porte-parole du CSSN est Hussein Entezami.

Le ministère de la Défense et de la Logistique des forces armées (MDLFA)
Depuis le début 2006, le ministre de la Défense est Moustafa Mohamed Najjar. Il semble que le MDLFA ait surtout un rôle logistique, laissant les décisions politiques au CSSN et la conduite des opérations à l’état‐major général. De nombreux « hommes d’affaires » internationaux apportent leur soutien logistique aux forces armées iraniennes. Ainsi, des Géorgiens auraient participé à la mise à niveau des MIG‐25, des Indiens à celle des MIG‐29 et des chars T 72, des Israéliens auraient fourni des pièces de rechange pour les transports de troupes blindés M‐113, des Américains auraient fait de même pour d’autres pièces de rechange. Ces personnes ‐ qui peuvent être considérées comme des trafiquants ‐ agissent en free‐lance sans l’autorisation de leurs gouvernements respectifs. Par contre, les pays qui apportent une aide officielle sont : la Corée du Nord, la Chine, l’Ukraine, la Syrie, la Libye et, dans une moindre mesure, la Russie.

L’état-major général
Les forces armées iraniennes (Artesh) sont placées sous le commandement du majorgénéral Ataollah Salehi. Son chef d’état‐major est le major‐général Hussein Firuz Abadi, un ancien membre des Pasdarans, jugé comme proche du président Ahmadinejad. La gendarmerie, la police nationale, les Pasdarans, les services juridiques et les inspecteurs généraux sont également subordonnés à l’état‐major général.
L’état‐major général comporte plusieurs organismes :
− le J1 chargé du personnel et de l’administration ;
− le J2 s’occupe du renseignement et de la sécurité. Ses capacités semblent douteuses, cependant, il bénéficie du satellite d’observation Sinah-1 ayant une résolution de 50 m3 ;
− le J3 a en charge l’entraînement, les opérations et les communications ;
− le J4 s’occupe de la logistique et du soutien ;
− le J5 est chargé des liaisons avec les organisations non militarisées. Le service militaire obligatoire dure 18 mois et s’effectue soit dans l’armée régulière, soit au sein des Pasdarans. 350 000 militaires sont des professionnels. L’âge minimum pour s’engager est de 16 ans, mais peut être abaissé en cas de besoin. Lors du conflit Iran‐Irak, on a vu des enfants‐soldats de dix ans ! L’âge de la conscription obligatoire est de 18 ans et, théoriquement, les soldats sont rappelables jusqu’à 49 ans, mais cette limite peut également
être repoussée en cas de besoin.

L’armée de terre
L’armée de terre, commandée par le brigadier‐général Mohamed Hussein Dadrass est forte de 350 000 hommes dont 220 000 appelés. Elle est organisée en 4 corps d’armée regroupant 4 divisions blindées, 2 divisions d’infanterie mécanisée, 5 divisions d’infanterie, des unités diverses de la taille de la brigade, 5 divisions d’artillerie, une division du génie et un groupe aéromobile. En cas de mobilisation, elle peut bénéficier d’un renfort de 350 000 réservistes.
Le groupe aéromobile basé à Téhéran est composé de la 55°division parachutiste et de la 23° division des forces spéciales dont les personnels sont en majorité de carrière. Les matériels sont nombreux mais très disparates ‐ ce qui crée de considérables difficultés au niveau de l’instruction des servants ‐ et certains manquent cruellement de pièces de rechange.
L’armée de terre iranienne compte environ 1 600 chars de bataille ; 1965 véhicules blindés divers ; 3 284 pièces d’artillerie ; 50 hélicoptères d’attaque, 173 hélicoptères de transport et 17 avions divers.

L’armée de l’air
L’armée de l’air est dirigée par le brigadier‐général Amad Miqani. Ses effectifs sont de 52 000 hommes.
18 bases sont opérationnelles en temps de paix. En cas de guerre, de nombreux autres aérodromes pourraient accueillir des appareils militaires. L’armée de l’air est forte de huit escadrons ayant des capacités de défense aérienne et d’appui au sol, d’un escadron de reconnaissance, de deux escadrons de ravitaillement et de cinq escadrons de transport. Elle possèderait actuellement plus de 200 chasseurs‐bombardiers opérationnels ; d’une centaine d’appareils divers et de 180 avions d’entraînement.
De plus, des rumeurs non confirmées font état de la présence en Iran de 10 F‐8M Finback, de 7 Tu‐22 M, de 19 MIG‐27 et de quelques MIG‐31. D’autre part, Téhéran aurait commandé un nombre non déterminé de chasseurs multifonctions « Super‐7 » chinois. Enfin, deux avions d’entraînement sont actuellement en développement localement : le Dorneh et le Parastu.L’armée de l’air met aussi en oeuvre 340 hélicoptères opérationnels de modèles différents.

La défense anti‐aérienne dépend de l’armée de l’air. A cet effet, elle dispose de 15 000 hommes. Cependant, faute de moyens suffisants, la couverture totale du territoire n’est pas assurée. De plus, il n’existe pas de commandement unifié où les informations recueillies peuvent être centralisées. En conséquence, seuls les sites qualifiés de sensibles sont correctement protégés.
Les matériels répertoriés sont les suivants : radars JY‐14 et AR‐3D ; 50 SA‐2 Guideline, 10 SA‐5 Gammon, 50 SA‐6/HQ‐2J Gainful, 15 Hawk, 30 Rapier, 10 HQ‐7 / FM 80 (chinois), 50 RBS‐70, 24 Skyguard ADS (un système mixte canons‐missiles), 15 Tigercat et un nombre non déterminé de Shahab Thaqeb de fabrication locale. La défense anti‐aérienne comprend également 940 pièces d’artillerie allant des calibres 23 à 57 mm. Téhéran tente actuellement d’acquérir auprès de la Russie des SA 10 (S‐300), 7 batteries de 4 lanceurs TOR‐M1 (SA‐15), des SA‐16 Igla et des S‐300 PMU. Elle possède déjà un certain nombre de missiles anti‐aériens portables : 325 SA‐16 Igla, Stiner FIM‐92A, SA 7 Grail. De manière à pallier aux critiques américaines, Moscou explique que les armements demandés n’ont qu’un rôle purement défensif.

La marine
Placée sous les ordres du vice‐amiral Sajjad Kouchaki Qavami, la marine comprend 18 000 hommes dont 2 600 fusiliers marins et 2 600 aviateurs. Cinq zones maritimes ont été définies : trois sur le golfe Persique (Bandar Abbas, Busher et Khark), une sur la mer Caspienne (Bandar Anzali) et une sur l’océan Indien (Chah Bahar). Bandar Abbas est la base navale la plus importante. Les autres sont Bandar Anzali,
Bandar Khomeini, Bandar Lengeh, Bushehr, Chahbahar, Jask et les îles de Farsi et de Kharg. La majorité des navires sont anciens, mal entretenus par manque de pièces de rechange et peu opérationnels. La seule menace réelle qu’ils peuvent représenter est de s’attaquer à des navires civils ou de miner le détroit d’Ormuz. La flotte possède encore quelques navires relativement opérationnels : 3 frégates Alvand, 2 corvettes Bayandor, 25 navires lance missiles, 25 vedettes rapides lance torpilles, 3 navires de patrouille côtière, 41 navires de patrouille fluviale, 2 poseurs de mines, 5 chasseurs de mines hors d’âge, 19 navires de transport et 25 navires de soutien. Des navires sont en construction dans les chantiers navals de Bandar Abbas : des Sina 1 de type Combattante et des corvettes Mowag de 1200 tonneaux.
L’Iran dispose également de 3 sous‐marins d’origine russe Kilo type 877 EKM ‐ peu adaptés aux eaux chaudes du golfe Persique ‐ et probablement d’un sous‐marin de fabrication locale appelé Nahang (baleine) dont les caractéristiques techniques ne sont pas connues. Cependant, ce submersible ne serait capable d’évoluer qu’à proximité des côtes. Elle possède également quatre sous‐marins de poche de fabrication locale (1 Sabehat et 3 Ghadir) qui sont destinés à emporter des nageurs de combat.Une information largement diffusée par les media fait état de l’essai réussi d’une torpille dont la vitesse pourrait atteindre les 360 km/heure. La seule arme connue ayant ces performances est la torpille russe VA6111 Shkval mise au point en 1995 par la Russie. La question se pose donc : qui a fourni cette torpille à Téhéran ?

Les Pasdarans
Les Pasdarans ou « milice révolutionnaire » constituent le corps des Gardiens de la révolution islamique « Sepah‐e pasdaran Enqelab‐e Eslamil » (IRGC) et disposent de leur propre ministère. Ils sont placés sous le commandement du major‐général Yahya Rahim Safavi et de son adjoint Morteza Rezai. Ils ont comme chef d’état‐major le brigadier général Mohamed Hejazi. Au nombre de 125 000, leur mission est de préserver la « révolution » à l’intérieur et à l’extérieur du pays. A cette fin, ils participent au maintien de l’ordre à l’intérieur et soutiennent des mouvements « amis » à l’étranger, tel le Hezbollah libanais et des mouvements palestiniens comme le Hamas. Les Pasdarans sont organisés en trois composantes : terrestre, aérienne et navale.
Les forces terrestres des Pasdarans regroupent 100 000 hommes. Les divisions des Pasdarans correspondent, en taille, aux brigades de l’armée de terre. Les Pasdarans ont également en charge la mise en oeuvre des armements stratégiques.
Les forces navales comprennent 20 000 hommes ‐ dont 5 000 fusiliers marins – placés sous l’autorité du vice‐amiral Ali Morteza Saffari. A la différence de la marine de guerre, les marins dépendant des Pasdarans sont spécialisés dans les coups de mains menés à bord d’embarcations rapides. Ils ont également le contrôle des missiles défense côtière. Leurs bases se trouvent souvent situées sur des îles comme Al Farsiyah, Sirri, Abou Moussa, Qeshm, Rostam et Larak. Mais, des implantations sont également présentes au terminal d’Abadan, aux gisements pétroliers de Cyrus et peut‐être sur des plates‐formes pétrolières comme celle de l’île Halul. La force aérienne des Pasdarans, commandée par le brigadier général Hossein Salemi est symbolique ‐ 5 000 hommes – tous les matériels modernes étant destinés à l’armée de l’air. Une exception cependant : un certain nombre de SU 25 Frogfoot auraient été livrés aux Pasdarans en 2003 par un pays non déterminé (Russie ? Ukraine ?). Cependant, cette information n’est pas confirmée.
Les forces spéciales des Pasdarans – dénommées Al‐Qods – comprennent 5 000 hommes. Ces hommes servent de service « Action » au pouvoir, intervenant aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur. Dépendant des Pasdarans, la réserve « Basij » est une milice paramilitaire qui s’est rendue célèbre durant la guerre Iran‐Irak par son esprit de sacrifice. Elle peut théoriquement mobiliser deux millions d’hommes et de femmes, mais en réalité, les effectifs disponibles pourraient être beaucoup plus importants, certains experts avançant le chiffre, vraisemblablement exagéré, de 7 millions de volontaires. Il n’en reste pas moins que leur formation militaire laisse beaucoup à désirer.

Stratégie d’action
Basée sur le modèle soviétique, les forces militaires iraniennes sont essentiellement formées à un combat classique de grande ampleur à caractère défensif où la puissance de feu est primordiale. L’emploi des armes chimiques fait partie des tactiques admises par l’état‐major. Les armées possèdent en abondance du gaz moutarde, du sarin, du soman, du tabun et de l’agent VX.
Cependant, tirant les enseignements du conflit ayant lieu actuellement en Irak, l’étatmajor envisage une nouvelle stratégie de guerre dite « asymétrique », surtout si l’adversaire est plus puissant, ce qui est le cas des Américains. En effet, le commandement militaire iranien se rend bien compte qu’il ne pourrait faire face efficacement à des unités blindées légères, extrêmement mobiles et disposant d’un soutien aérien puissant. En prévision d’attaques aériennes, des opérations de déception auraient été préparées. Ainsi, nombre d’équipements militaires non opérationnels (blindés, navires, avions, hélicoptères) seraient déployés sur différents sites afin de servir de leurres. L’objectif de l’état‐major serait ensuite de conduire un combat retardateur, avant de pouvoir passer à des combats de type guérilla, où ses unités attaqueraient les lignes de communications de l’adversaire et harcèleraient les forces d’invasion. Les kamikazes pourraient être employés à grande échelle d’autant qu’une organisation qui n’a théoriquement aucun lien avec le pouvoir, aurait sélectionné 20 000 candidats à l’attentat suicide.
Enfin, l’Iran tenterait également d’interdire toute navigation dans le golfe Persique à l’aide de son aviation, de ses batteries côtières, de ses vedettes rapides et de ses sous‐marins.

Publié dans Ayatolland d'Iran

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